Le récit de voyage du commandant Belvèze reproduit au fil du site ne représente que le premier volet du rapport plus détaillé qu'il fera paraître dans la Revue coloniale de janvier à juin 1856 (deuxième série, tome XV, Paris, Imprimerie et librairie administratives de Paul Dupont, 1856, p. 7-23), adressé au ministre de la Marine. On en trouvera ici la suite, partagée en quatre sections : Le rapport se conclut sur un envoi optimiste quant aux retombées de son séjour : « Tout a réussi, ce me semble, dans cette reprise de relations, et je souhaite que ce succès soit complété et sanctionné par l'approbation du Ministre et du Gouvernement de Sa Majesté. »
Le « tout a réussi » du commandant est loin de trouver le même écho dans les journaux de l'époque, dont plusieurs dressent un portrait fort différent du passage de La Capricieuse dans la Province du Canada en 1855 :
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Un texte polémique, paru dans la rubrique « Canada » de l'édition du 23 août 1855 du Moniteur canadien, soulève des doutes quant aux intentions qui se cachaient derrière la mission du commandant de La Capricieuse, allant même jusqu'à soupçonner Belvèze d'espionnage.
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Au contraire, répond La Patrie en date du 28 août 1855 : « [N]ous n'avons pas le moindre doute que la mission de M. de Belvèze était bien et réellement, telle qu'il la représentait, d'une nature toute commerciale, sans arrière pensée aucune. »
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Le 30 août 1855, Le Moniteur canadien rétorque : « L'idée de rattachement du Canada à la France n'a pu germer que dans le cerveau de quelques hommes ignorants ou aveuglés par la nationalité ».
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La Patrie renchérit le 31 août 1855 : « Nous espérons qu'avant longtemps nous commencerons à voir la réalisation des espérances qu'a fait concevoir, au Canada, la visite de M. de Belvèze, et que les incrédules seront convaincus, malgré eux, de la réalité de sa mission commerciale ».
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Le 4 septembre 1855, La Minerve choisit pour sa part de tempérer les opinions publiées dans Le Moniteur canadien : « Le départ de la Capricieuse a donné libre carrière à l'imagination des journalistes qui ne peuvent accepter les déclarations de M. de Belvèze comme seules suffisantes à expliquer sa visite au Canada ».
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Le Canadien fera de même, en publiant les 7 et 10 septembre 1855 un compte rendu très critique des positions du Moniteur canadien. |

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L'arrivée de M. le Commandant doit faire époque dans l'histoire du Canada. Souvent les plus petites causes produisent les plus grands effets, les moindres circonstances amènent de grands résultats. |
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Wolfred Nelson, maire de Montréal, lors du banquet tenu en l'honneur de Belvèze le 30 juillet 1855, au St. Lawrence Hall (« Banquet offert a M. de Belvèze, commandant de la corvette La Capricieuse », La Minerve, vol. 27, no 120, 31 juillet 1855, p. 2.) |
Sur le plan politique, si l'on attribue souvent à la venue de La Capricieuse l'établissement du premier consulat de France, il faut également considérer son influence sur la production artistique de l'époque. En effet, outre les chansons d'Adolphe Marsais, poète arrivé à Québec en 1854 et dont la prolifique production surpasse en quantité celle de tous les poètes canadiens-français au milieu du XIXe siècle, le séjour de Belvèze trouve entre autres un écho dans les œuvres suivantes :
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Aux marins de la Capricieuse d'Octave Crémazie (1827-1879), poème datant de 1855; |
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Le flûtiste, tableau d'Antoine Plamondon (1804-1895), datant de 1866; |
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« La Capricieuse », poème tiré de La légende d'un peuple (1887) de Louis Fréchette (1839-1908); |
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les Mémoires de Philippe Aubert de Gaspé [père] (1786-1871), publiés en 1888; |
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enfin, « Burns », récit de Louis Fréchette (1839-1908), tiré d'Originaux et détraqués. Douze type québecquois (1892). |

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Ce fut une minute émouvante que celle de l'après-midi du 9 février 1954, où [...] je montrai au Très honorable Louis Saint-Laurent, Premier Ministre du Canada, et à Son Exc. M. l'Ambassadeur Jean Desy, l'original du rapport du Capitaine de vaisseau Belvèze, commandant [de] la corvette La Capricieuse, sur son voyage aux rives du Saint-Laurent. |
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[...]
Je proposai à mes éminents visiteurs d'organiser une exposition qui, en 1955, célébrerait le centenaire du fameux voyage. J'ajoutai qu'elle pourrait avoir lieu à La Rochelle, principal port d'armement français pour le Canada, lieu d'embarquement de tant de sujets des rois Louis XIV et Louis XV à destination de la Nouvelle France.
Mon offre fut adoptée d'enthousiasme.
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Charles Braibant, avant-propos à France et Canada. Catalogue de l'exposition, La Rochelle/Paris, s. n., 1955. |
En 1955, la Poste française émet à 2 200 000 exemplaires un timbre commémorant le voyage de La Capricieuse. Oblitéré le jour de son émission, le 7 juillet 1955, l'exemplaire que l'on voit ici permet en outre d'apprécier la qualité du dessin d'Albert Decaris, peintre officiel de la Marine française. D'une valeur faciale de 30 francs, il sert d'affranchissement à une lettre simple pour l'étranger. Il est retiré de la vente le 10 décembre 1955.
En espérant vous avoir rendu agréable et instructif le rappel des événements autour de La Capricieuse, nous vous invitons à fermer cette page historique en écoutant le « Chant des voyageurs » d'Antoine Dessane (1826-1873), composé sur des vers d'Octave Crémazie.
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