« Banquet offert a M. de Belvèze, commandant de la corvette La Capricieuse », La Minerve, vol. 27, no 120, 31 juillet 1855, p. 2 :
Le banquet offert au commandant de la corvette française, la Capricieuse, a eu lieu avec beaucoup d'éclat, au St. Lawrence Hall, samedi soir. L'hon. John Young, président du bureau de commerce, présidait à la table, ayant à sa droite M. le commandant Belvèze, à sa gauche son honneur le maire, et était assisté de MM. Dorion, Loranger et Starnes, vice-présidents. 164 convives se pressaient autour d'une immense table chargée des mets et des vins les plus exquis et les plus recherchés.
Pendant le diner [sic], l'orchestre de Prince [Henry Prince] exécuta les morceaux suivans [sic] :
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Marche - Partant pour la Syrie |
Anonyme, « Partant pour la Syrie », face B de Si mes vers avaient des ailes, Montréal, His Master's Voice (XX-0021), 1920?. Interprétation de Joseph Saucier (1869-1941), baryton.
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Ouverture Medley - Introduction, Old Dog Tray et Farewell my Lilly dear. |
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Air Ecossais. - La Capricieuse, composé pour la circonstance, par Prince. |
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Ballade. - La Bohémienne [de Georges Bizet?].
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Polka Nationale |
Anonyme, « Polka canadienne », face B de Si mes vers avaient des ailes, Montréal, Starr (16626), 1937. Interprétation de Joseph Olivia LaMadeleine (1880-1973), violon, et de Marcel LaMadeleine (?-?), guitare.
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Pas redouble. |
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Galop de Schomberg.
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Lorsque les plats furent disparus les uns après les autres, et qu'un certain nombre de bouteilles eurent été mises hors de combat, le président requit le silence pour proposer les santés d'ordre. Il dit que leur hôte, M. Belvèze, ayant demandé la faveur de proposer la première santé, il lui a accordé cette demande avec plaisir, certain qu'elle sera bue avec enthousiasme en étant proposée par lui. (Applaudissemens [sic].)
M. Belvèze se lève alors et dit. - M. le président et messieurs, - J'ai reclamé [sic] la faveur et je suis heureux de pouvoir porter la première santé : A la reine Victoria! (Applaudissemens [sic].) Son règne sera illustre dans l'histoire des guerres puisqu'il aura remplacé la politique des peuples et d'effusion de sang par celle de la défense de la justice, des droits des peuples et des nations faibles contre les nations fortes. Dans les siècles passés, l'Angleterre peut revendiquer beaucoup de la et gloire des malheurs qui s'attachent aux grandes guerres; mais aujourd'hui, elle peut aussi revendiquer la gloire et le bonheur d'avoir inauguré le règne de la paisible industrie, du commerce et des arts. Je bois donc à la santé de la reine Victoria; que son règne et sa vie soient longs et prospères! (Bruyans [sic] applaudissemens [sic].)
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God Save the Queen, par l'orchestre.
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2e Santé. - L'hon. M. Young propose la santé de l'Empereur des Français. - Il dit qu'il ne pense pas qu'il soit nécessaire de faire un long discours pour faire accepter cette santé comme l'a été la précédente. Les mots ne sont pas nécessaires pour cela, il suffit de dire que l'Empereur des Français est allié de l'Angleterre, et cela est suffisant pour qu'on boive à sa santé avec autant d'enthousiasme qu'il est possible de le faire. (Applaudissemens [sic].)
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Partant pour la Syrie par l'orchestre.
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3e Santé. - Au Gouverneur-Général. (Reçue avec de vifs applaudissemens [sic].)
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A la Claire Fontaine, par l'orchestre. |
Anonyme, « À la claire fontaine », Montréal, Berliner Gram-O-Phone Co. (168), 1900?. Interprétation de L. Loiseau, baryton.
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Le Col. Irwine répond à cette santé. - Messieurs, dit-il, ayant été requis par Son Excellence le Gouverneur-Général d'accompagner le commandant Belvèze à Montréal, je dois vous exprimer les sentimens [sic] de Son Excellence, qui sera certainement très flattée d'apprendre la cordiale manière avec laquelle vous avez reçu le toast qui vient d'être proposé. Il n'est pas habitué à faire de longs discours et il ne prendra pas le tems [sic] des convives en en faisant un, mais il remercie les citoyens de Montréal au nom du gouverneur général, et ne manquera pas de lui rapporter ce qu'il vient d'avoir le plaisir de voir. (Applaudissemens [sic].)
4e Santée [sic] : - A Mr. de Belvèze et aux officiers de l[a] Capricieuse.
L'Hon. M. Young. - En proposant cette santé, messieurs, permettez-moi de dire quelques mots. Les circonstances qui ont amenées M. le Commandant Belvèze à venir ici en Canada, sont tout-à-fait extraordinaires; et le fait lui-même de le voir ici est extraordinaire. Nous avons aujourd'hui dans les eaux du St. Laurent un vaisseau de guerre français qui y vient non pas comme ennemi, mais pour une mission toute pacifique. Notre hôte, M. de Belvèze, vient ici pour étendre les relations commerciales entre la France et le Canada. Cet événement a été considéré si important que le Bureau de Commerce a cru devoir, pour la première fois, recevoir un visiteur officiellement et lui donner un banquet de concert avec les citoyens de Montréal. (Applaudissements.)
C'est que la mission de M. Belvèze est importante non seulement pour le commerce de Montréal ou des villes, mais encore pour tout le pays en général. Afin de montrer l'importance de cette mission, et pour prouver que le Bureau de Commerce a bien agi en faisant cette réception à M. Belvèze, il suffit de dire qu'il y a huit ans, par exemple, les marchands canadiens ne pouvaient importer de marchandises de l'étranger et surtout de la France, qu'en payant des droits énormes, si énormes qu'ils équivalaient presque à une prohibition; il y a six ans aucun vaisseas [sic] étranger ne pouvait venir à Montréal. Depuis, toutes ces restrictions ont été mises de côté, et nous pouvons maintenant importer nos marchandises par le St. Laurent à aussi bon marché que par N-York ou de Boston; en un mot, nous pouvons faire le commerce et donner nos marchandises à aussi bas prix qu'aucune autre nation; - et M. Belvèze vient ici pour étendre encore ces facilités commerciales et entretenir entre la France et le Canada des relations de même nature que celles que nous entretenons avec l'Angleterre ou les Etats-Unis. (Applaudissements.)
Pour moi, messieurs, j'espère bien que M. le Commandant réussira dans sa mission, et je ne désespère pas de notre position. Les marchands du Bas-Canada sont actifs et intelligents, et ils pourront approvisionner tout le Canada, et même les territoires immenses de l'Ouest, par la voie du St. Laurent, qui est la voie naturelle du commerce entre l'Europe et ces régions de notre hémisphère. Convaincu de ce fait, le gouvernement canadien a approuvé, l'année dernière, le projet de faire représenter le Canada à la Grande Exposition de Paris, en y envoyant des échantillons de nos bois et de nos produits bruts et manufacturés, et je puis dire que le Canada est dignement représenté à cette Exposition. On ignorait, sur le continent, ce qu'était le Canada; c'est pourquoi le gouvernement a fait préparer des essais et des cartes qui serviront à le faire connaître et à promouvoir ses intérêts.
Je répète que le St. Laurent est la voie naturelle du commerce entre le Canada et le continent, car, en comparant les distances qui nous séparent de l'Angleterre, on peut s'assurer que Toronto est presque aussi près de Liverpool que l'est New-York, et que Montréal en est plus proche de 200 milles. Pourquoi donc ne ferions-nous pas notre commerce directement avec l'Europe, au lieu de passer par les Etats-Unis?
Je suis certain que lorsque M. Belvèze aura vu le Haut-Canada et qu'il rapportera à son gouvernement tout ce qu'il aura vu, il sera fait des efforts en France pour mettre à exécution le projet qu'il a en vue en venant ici, c'est-à-dire d'étendre les relations commerciales directes entre les deux pays. Les importations de France seront encouragées par notre gouvernement, et cela ne pourra être suivi que des effets les plus satisfaisans [sic] pour notre population. Je ne suis certainement pas grand partisan de la loi du Maine, et je vous en ai donné la preuve ce soir, mais je crois qu'il serait très-désirable de voir diminuer la consommation des liqueurs alcooliques pour les remplacer par une boisson meilleure et plus salutaire, par des vins qui nous viendraient de France. En 1852 et 1854, il a été importé près de 700,000 gallons de whisky de plus que de vins français. Les partisans du régime de l'eau devraient travailler à remplacer les boissons alcooliques par des vins français, qui sont en si grande abondance en France, et leur but serait plutôt atteint, car on boit plus d'eau avec le vin qu'avec le whisky. (Applaudissements et rires.)
Les droits sur le whisky étaient de 3d par gallon et 12½ pour cent ad valorem, tandis que les vins français payaient 6d par gallon et 30 pour cent ad valorem. Aujourd'hui les droits sur les vins sont encore élevés et sont presque de 100 pour cent. Cela est évidemment trop fort et ça équivaut à une prohibition complète. Si nous désirons encourager le commerce avec la France, nous devons diminuer nos droits, et j'espère bien que M. Belvèze parviendra à engager son gouvernement à demander des relations plus intimes et plus faciles qu'aujourd'hui, et que nous en viendrons à commercer avec la France comme nous trafiquons avec l'Angleterre. (Applaudissements.)
Mais la visite de M. Belvèze doit être envisagée sous un point de vue plus important, car sa mission commerciale ne touche qu'aux intérêts matériels, et je dis que sa visite est plus importante encore sous le point de vue moral. Il est reçu et fêté non seulement parce qu'il vient ici pour étendre les relations commerciales entre les deux pays, mais parce qu'il est le représentant de la glorieuse alliée de l'Angleterre. L'esprit commercial ne serait pas suffisant pour nous porter à la recevoir avec autant d'enthousiasme; mais en le voyant, nous nous rappelons la belle et noble conduite de la France, qui combat aujourd'hui à côté de l'Angleterre pour la défense d'une faible nation contre la barbarie du Nord. Nous nous rappelons la vaillante conduite de la France, dont les soldats et les marins versent leur sang en Crimée, non pour étendre le territoire de leur patrie, mais pour défendre la liberté d'un peuple contre un tyran qui voudrait l'écraser. (Applaudissement [sic] prolongés.)
Je ne veux pas abuser plus longtemps de votre patience, messieurs, et je vais laisser la parole à mon ami M. Dorion, qui exprimera en français les mêmes sentiments que je viens d'exprimer en anglais. (Applaudissemens [sic].)
A.A. Dorion, Ec. M. P. P. - Messieurs, les éloquentes paroles que vient de prononcer mon ami M. Young rendent ma tâche beaucoup plus facile à remplir, et je me rends avec plaisir à l'invitation qu'il me fait de répondre à la santé de M. Belvèze et aux officiers de la Capricieuse. Comme l'a si bien dit mon honorable ami, la mission de M. Belvèze est une mission toute pacifique, une mission de paix et de commerce international. Il vient ici, représentant d'une grande nation avec le pavillon de la paix en mains, quand la guerre rugit de l'autre côté de l'Atlantique; il vient ici, dis-je, nous demander de nous rapprocher de la France, cette ancienne mère-patrie dont le souvenir est encore si vivace dans nos cœurs, au moyen de relations commerciales plus intimes. Il trouvera au Canada des cœurs qui répondent avec bonheur à cette demande, car elle est une indication que la France se rappelle encore de nous au-delà des mers. (Applaudissemens [sic].) Il y a ici un demi-million des descendants de la France qui seront heureux de renouer des relations avec elle et qui conservent son souvenir.
En remontant le St. Laurent, M. Belvèze rencontrera des forts qui autrefois servaient à la guerre, mais qui aujourd'hui ne sont plus que des ruines; ils ont été remplacés par des éléments de paix et de prospérité, par des usines, des fabriques, des canaux et des chemins de fer qui portent la vie et le bonheur par tout le pays. L'esprit d'entreprise a remplacé l'esprit guerrier, et aujourd'hui il nous faut des communications pacifiques avec les peuples d'audelà [sic] des mers. (Applaudissements.)
Le représentant de la France ne pouvait venir dans un meilleur temps : nos marchands canadiens viennent d'établir des moyens de communications plus directes et plus rapides avec l'Angleterre au moyen d'une ligne de bateaux à vapeur, et il leur faut aussi en établir bientôt avec la France, qui ne pourront tourner qu'aux profit des deux pays. Il y a à peine huit ans nous n'avions pas un seul navire étranger dans notre port; aujourd'hui les vaisseaux de toutes les nations peuvent apporter les produits de leurs pays jusqu'à Montréal; et je suis certain que nous en verrons un grand nombre dans nos ports, quand on connaîtra les besoins et les ressources du Canada par le rapport que fera M. Belvèze à son gouvernement. Il pourra dire qu'il a trouvé au Canada une population de trois millions d'hommes de toutes les origines et de toutes les croyances, vivant ensemble dans une alliance qui a précédé celle de la France et de l'Angleterre contre la Russie. Vous pouvez dire à votre gouvernement, M. le Commandant, que ceux qui se trouvent à l'étroit sur le sol européen, ou qui y sont aux prises avec le besoin ou la pauvreté, peuvent trouver une nouvelle patrie au Canada, vous leur direz que nous sommes prêts à les recevoir et que nous avons de l'espace à leur disposition; qu'avec du courage et du travail ils trouveront l'aisance et le bien-être, et surtout qu'ils trouveront une population de frères qui se rappellent avec bonheur qu'elle desdend [sic] de la France. (Applaudissemens [sic].)
Les Canadiens accueillent votre mission avec enthousiasme, non seulement parce qu'elle est une mission de paix et de prospérité, mais parce qu'elle est un nouveau pas vers l'union des peuples. L'alliance de l'Angleterre et de la France a été un premier pas dans cette voie, et nous avons vu avec bonheur ces deux grandes nations s'allier pour défendre un peuple faible et opprimé. Déjà nous avons eu occasion d'exprimer nos sympathies pour la cause que soutiennent la France et l'Angleterre, celle des peuples opprimés; ces sympathies sont partagées par tous les habitants du Canada sans distinction. Nous espérons que la guerre qui se poursuit maintenant contre la Russie ne sera pas une guerre stérile pour l'humanité; l'alliance anglo-française sera le commencement de l'alliance et de la solidarité de tous les peuples, afin qu'il n'y en ait pas qui puisse être opprimé parce qu'il est faible. (Applaudissemens [sic].) Nous verrons avec bonheur la fin d'une guerre qui entraine [sic] tant de maux après elle, mais nous espérons qu'elle se terminera glorieusement pour la France et l'Angleterre, et qu'elle tournera à l'avantage de la justice et des droits des peuples opprimés.
En terminant, je puis vous assurer, M. le Commandant, que toutes les classes de notre société vous accompagnent de leurs sympathies et s'intéressent vivement au succès de votre mission qui devra produire des relations avantageuses au commerce des deux pays, la France et le Canada, et c'est dans ces sentiments que nous nous unissons pour boire la santé qui vous est proposéet [sic] M. le Commandant et MM. les officiers de la Capricieuse. (Applaudissements.)
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La Parisienne par l'orchestre.
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5e Santé. - Au Maire et aux Citoyens de Montréal. - M. Belvèze se lève et dit - Messieurs, la bienveillance avec laquelle on a accueillie [sic] la Capricieuse et ses officiers est certainement très-flatteuse [sic] pour nous. Je suis aussi heureux d'entendre les sentimens [sic] que vous venez d'exprimer, et je ne sais comment vous remercier de la brillante réception que vous me faites. Je n'ai pourtant pas d'autre mérite que celui d'avoir le premier inspiré au gouvernement français la démarche que je fais aujourd'hui, et la manière dont j'ai été accueilli par vous prouve que ma mission a été aussi bien comprise ici qu'elle l'a été en France. Encore une fois, je vous remercie de tout cœur, et je propose de boire à la santé du maire, - qui m'a si bien reçu et qu'on ne peut qu'estimer quand on a fait sa connaissance, - et des citoyens de Montréal dont je me souviendrai toute ma vie.
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Son Honneur le Maire, W. Nelson, répond à cette santé, qui n'était pas sur le programme.
M. le Commandant et Messieurs, - Le seul regret que j'éprouve en répondant à cette flatteuse santé, c'est de ne pas mériter tous les éloges que veut bien me faire M. Belvèze, et je suis heureux qu'il ait eu la bonté d'accompagner mon nom à celui des citoyens de la ville de Montréal; cela me met plus à l'aise pour vous répondre et me dégage de la contrainte que j'aurais éprouvée en parlant pour moi seul. En vous exprimant, M. le Commandant, la reconnaissance des citoyens de Montréal pour l'heureuse idée que vous avec [sic] eue de suggérer à votre gouvernement la mission que vous êtes en voie d'accomplir, je puis vous assurer que vous trouverez chez eux un ardent désir de la voir se terminer selon vos vœux, et leur coopération la plus sincère pour parvenir à cet heureux résultat. Je suis heureux de voir que l'Empereur Napoléon, avec son bon sens ordinaire, a vu que la personne la plus capable de bien remplir la mission dont il vous a chargé, était celle qui l'avait suggérée, et je suis heureux qu'il ait compris l'avantage qui résulterait pour la France et le Canada de relations commerciales plus étroites entre les deux pays.
Lorsque Jacques Cartier a remonté pour la première fois notre beau fleuve St. Laurent, il s'est arrêté au pied de la montagne Hochelaga, et il a rapporté à son gouvernement qu'il y avait une place qu'on pouvait réellement appeler le Mont Royal. Et c'est à ce même endroit que vous êtes aujourd'hui. Les descendants de la France et de l'Angleterre forment aujourd'hui la population du Canada et jouissent en commun de tous les avantages qu'on y rencontre. Ils ont aussi de l'espace pour ceux qui veulent venir s'y établir. Autrefois l'extrême limite de la navigation était Montréal, et Jacques Cartier n'est jamais remonté plus haut. Il serait bien surpris, aujourd'hui, ainsi que Charlevoix, de voir que l'extrémité de la navigation a été reculée jusqu'au grand lac Supérieur. (Applaudissements.)
Mais ce ne sont pas là tous les progrès que nous sommes destinés à faire, et il viendra un temps où on communiquera avec l'Orient par le Canada. Vous qui êtes jeune encore, M. le Commandant; vous qui avez probablement plus d'années à vivre que moi, vous verrez peut-être l'époque où les produits de la France, de l'Angleterre et du Canada iront de pair et seront exportés en Orient ou aux Indes par la route du Canada, pour porter la richesse et le bien-être dans le monde entier. (Applaudissements.)
L'arrivée de M. le commandant doit faire époque dans l'histoire du Canada. Souvent les plus petites causes produisent les plus grands effets, les moindres circonstances amènent de grands résultats. S'il a bien compris M. le commandant, sa visite est dû [sic] à une circonstance insignifiante en apparence. Les îles St. Pierre étaient en proie à la famine, il y a deux ans, et le gouvernement français envoya M. Belvèze à New-York acheter de la fleur [farine] pour les îles St. Pierre. Quel a été son étonnement en voyant que la plus belle fleur qui se trouvait sur ce marché était de la fleur canadienne! Cela suffit pour lui faire deviner que le Canada avait beaucoup de ressources, et qu'on pouvait établir un commerce avantageux pour les deux pays entre la France et le Canada. C'est ce qui le porta à en parler à son gouvernement, et il a la gloire d'être le premier qui ait suggéré efficacement d'établir des relations commerciales entre les deux nations. Je dois dire à l'honneur des Canadiens-Français, eux qu'on a si souvent accusé [sic] de manquer d'esprit d'entreprise, que le commerce du Canada se fait en partie par eux, et que la France trouvera certainement son avantage à commercer avec eux. (Applaudissemens [sic].)
6e Santé. - Aux armées ulliées [sic] de la France et de l'Angleterre.
En proposant cette santé, l'hon. M. Young dit qu'il croit inutile pour lui de faire aucune remarque pour faire boire cette santé avec le plus vif enthousiasme. Il n'est pas nécessaire de parler pour exciter la sympethie [sic] en faveur des braves armées d'Orient, il suffit de rappeler l'Alma et Balaclava pour recevoir cette santé comme elle le mérite. (Longs applaudissemens [sic].)
T.J.J. Loranger, Écr., M. P. P., fut appelé à répondre à cette santé. Messieurs, dit-il, en buvant à la santé des armées des deux glorieuses nations anglaise et française, j'éprouve un sentiment d'orgueil facile à comprendre. Je suis sujet britannique, j'appartiens à la grande nation qui tient le sceptre des mers, et qui par la vaillance de ses armées, occupe avec la France, le premier rang, parmi les nations du globe. Je ne suis pas, il est vrai, sujet de la France, mais je suis Français par les liens de la descendance. Je suis Français de cœur et de parole. Je bois donc comme Canadien-Français, à la gloire des deux grandes nations auxquelles je me fais gloire d'être lié. (Applaudissements.)
Longtemps elles ont été ennemies. Longtemps elles ont combattu l'une contre l'autre, parceque [sic] des préjugés les divisaient, parceque [sic] des haînes [sic] sans causes légitimes les faisaient ennemies. Aujourd'hui il n'en est plus ainsi; les préjugés ont disparu, l'amitié et la fraternité ont remplacé les anciennes haines, et je vois avec un véritable bonheur, les officiers de chacune des armées des deux grandes nations s'asseoir fraternellement à ce banquet, et boire à la Reine et à l'Empereur avec le même enthousiasme (applaudissements). Depuis que ces deux peuples chevaleresques ont fait cause commune, et se sont alliés pour défendre la civilisation contre la barbarie, depuis qu'ils se sont ligués contre l'intolérance de l'Église Grecque, et pour maintenir la liberté de conscience bien entendue; nous devons, Canadiens, quelque soient nos préjugés et nos croyances religieuses, applaudir à cette lutte héroïque qu'ils ont engagée contre le Géant du Nord. Cette guerre par son importance comme guerre, et par la grandeur du but des alliés, devra occuper le premier rang dans l'histoire. Ses fastes ont inséré bien des faits glorieux, bien des actes héroïques de ces deux grandes nations, et les pavillons qui décorent cette enceinte, y tiennent une large place; bien des pages ont été écrites pour célébrer la valeur des habits rouges et des habits bleus, mais aucune ne sera mieux remplie que par la guerre actuelle (applaudissements). La griffe du Léopard a quelquefois étreint la fleur Lys. La valeur française a souvent fait entendre contre l'Anglais ce mot de ralliement, Montjoie et St. Denis, mais Français et Anglais n'ont été ennemis que parce qu'ils ne connaissaient pas leurs véritables intérêts. Leur alliance actuelle en est une preuve; aussi quand une grande pensée religieuse ou humanitaire se révèle au monde, il les trouve unis. C'est ainsi que de concert, ils ont couru à la délivrance du tombeau du Christ, qu'ils se sont croisés contre les Sarazins [sic], ces Philistins modernes qui n'ont pas fait l'arche d'alliance captive mais qui polluèrent la sainteté du Golgotha (Applaudissemonts [sic].)
Plusieurs siècles se sont écoulés depuis les grandes batailles mémorables où les nations alliées d'aujourd'hui se combattaient avec outrance, et l'on ne demande plus aujourd'hui laquelle a été victorieuse et la quelle [sic] a été vaincue. Bien de graves événements ont eu lieu depuis que les Montcalm et Wolfe se disputaient les destinées de l'Amérique, et aujourd'hui leurs cendres reposent ensemble et l'on ne distingue pas le vainqueur du vaincu; l'on voit sur le cap de Québec, théâtre de leurs exploits, un monument commun élevé à leur gloire, portant une inscription dans un langage qui n'est ni français ni anglais, et cette inscription dit que tous deux ont eu une gloire commune, une même valeur égale, que la postérité leur a élevé un même monument, signe de l'alliance et de la fraternité des deux origines en ce pays. (Applaudissemens [sic.) Duquesne, Jean Bart et Nelson firent tour à tour éclater la gloire maritime des deux nations ennemis [sic], mais l'univers admire aujourd'hui leur valeur sans leur demander leur origine. La France et l'Angleterre se sont souvenues que leur puissance était le patrimoine de la civilisation opprimée par la tyrannie moscovite, et elles ont oublié leur ancienne haine. Le monde entier applaudit à cette alliance, et si nos braves ne peuvent être entendus d'elles, que le représentant de la France en soit témoin, car la démonstration de ce soir n'est pas seulement le repas de l'hospitalité, mais elle est l'expression de la sympathie du Canada envers les armées engagées dans la lutte immortelle de la Crimée. Buvons à la gloire égale des armées de terre et des armées navales. Que la franche poignée de mains que nous donnons au commandant Belvèze soit la preuve de nos sympathies, (applaudissements) et finissons en criant tous d'une voix : Vive les armées alliées et les marines de la France et de l'Angleterre.
(Longs et bruyants applaudissements.)
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Les Girondins, et Cheer, Boys, Cheer, par l'orchestre.
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Le Major Général Home remercie M. Loranger des paroles qu'il vient de prononcer, et il exprime l'espoir et la conviction que les armées alliées parviendront à prendre Sébastopol avant peu.
7e Santé. - A l'extension des relations commerciales entre la France et le Canada.
L'Hon. M. Young, en proposant cette santé, dit qu'il ne fera aucune remarque, parce qu'il est déjà tard et que les dames attendent déjà depuis assez longtemps que le diner [sic] soit fini, et qu'il ne serait pas galant de se faire attendre davantage. [Applaudissemens [sic].]
8e Santé. - Aux Dames.
Cette santé était la dernière, et elle fut bue au milieu d'applaudissemens [sic] qui tenaient lieu du plus beau discours.
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Vive la Canadienne, par l'orchestre. |
Anonyme, « Vive la Canadienne », harmonisation par Amédée Tremblay (1876-1949), Montréal, His Master's Voice (XX-0019), 1920. Interprétation de Joseph Saucier (1869-1941), baryton.
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L'ordre des santés étant épuisé, les convives laissèrent la table et se rendirent dans le salon où se trouvainnt [sic] déjà un grand nombre de dames. Du café et plusieurs autres rafraichissemens [sic] furent servis, et la compagnie se dispersa vers minuit.
MM. Hogan et Penn se sont surpassés pour satisfaire leurs hôtes, et on en pourra juger par la liste suivante des mets et des vins répandus partout à profusion.
SOUPES.
Julienne. Tortue verte
POISSON.
Saumons - avec sauce au homard.
ENTRÉES.
Petits pâtés aux huîtres.
Grenadine de veau, aux petits pois.
Chevalier de volaille aux truffes.
Côtelette d'agneau aux champignons.
Fricandeau de tortue - sauce aux tomates
Ris de veau glacés aux petits pois.
Timbales d'Huitres [sic], crête de coq aux truffes.
RÔTIS.
Filet de bœuf aux radis.
Dinde, sauce aux attakas [sic].
Agneau, sauce à la menthe.
Filets de veau.
Canards.
BOUILLIS.
Ronde de bœuf et Végétables [sic].
Dinde, Sauce au Cellery [sic].
Gigot de mouton, sauce aux câpres.
Jambon, sauce au Champagne.
VIANDES FROIDES.
Galantine de dinde à la gelée.
Pâté de perdrix truffées.
LÉGUMES.
Choux[-]Fleurs, Pommes de terre nouvelles, Haricots Français, Tomates, Pois Verts, Concombres, Légumes Verts, Betteraves Laitue.
GIBIER.
Bécasse anglaise, Bécasse, Faisans, Salade de homards, Pigeons, mayonnaise.
PÂTISSERIES.
Plum pudding, Tartes aux groseilles, Compote de Fruits, Gelée aux Fruits, Gelée au Champagne, Charlotte Russe, Tartes aux framboises, Tartes aux bleuets.
DESSERT.
Pyramides, Ananas, Prunes, Pièces montées, Framboises, Figues, Oranges, Pêches, Noix, Melons d'eau, Cerises, Amandes, Raisins.
VINS.
Champagne, Bordeau, Porto, Sauterne, Sherry.
CAFÉ.
Curaçao, Noyau.
Communiqué.
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