
« [Le Moniteur Canadien] », Le Canadien, vol. 25, no 53, 10 septembre 1855, p. 2 :
On a pu voir, par nos citations textuelles du Moniteur Canadien, avec quelle magnanimité ce journal attend le départ de M. le commandant français Bellevèze [sic], pour lui reprocher en termes de dénigrement sa mission d'affaires en Canada, et inculper, par là même, le gouvernement et la province entière du bon accueil qu'il en a reçu. Ce n'est pas qu'il faille s'inquiéter fort des appréciations du Moniteur : elles ne sont point de nature à produire cet effet. Seulement, il est bon de rééditer quelquefois l'œuvre de « la démocratie peinte par elle-même. » C'est ce que nous faisons ici en reproduisant, non les accusations, mais les soupçons (ce qui est beaucoup plus terrible) du Moniteur Canadien, touchant les motifs réels de la mission de M. Bellevèze [sic].
Mais les « soupçons » du Moniteur ne lui suffisent pas, il emprunte encore ceux de « son correspondant de New-York. » On pourrait se demander peut-être quels renseignements apporte le « correspondant de New-York » à l'appui des « soupçons » du Moniteur. Mais pourquoi cette question? C'est bien avec le Moniteur que l'on peut espérer de s'entendre! Il nous dit en effet :
« Mais les conjectures de notre correspondant de New-York se représentent souvent devant (?) notre esprit; et plus nous examinons la situation européenne; plus nous nous sentons disposés à croire que M. Belvèze est venu en Canada “pour étudier le terrain.” »
Oui, pour étudier le terrain : et de quel notre objet aurait il [sic] eu à s'occuper en « venant au Canada » s'éclairer lui-même sur les ressources et les produits de la contrée? L' « opinion » du Moniteur, qui se réduit à croire, et celle du correspondant de New-York, qui se réduit à conjecturer, ne prouvent encore rien au-delà de ce cercle.
« Une corvette armée de trente-deux canons, commandée par un chef de station, dépêchée vers nos ports dans un but commercial, cela nous parait plus que diplomatique. »
Cela est pourtant assez simple. Le commandant est venu dans une corvette parcequ'il [sic] en avait une à sa disposition. La « diplomatie » voulait-elle nécessairement qu'il vint dans une patache? Quest-ce [sic] que la longueur d'un bâtiment prouve pour ou contre les idées diplomatiques?
« Fallait-il des renseignements sur l'état du Canada, évidemment le gouvernement français n'avait pas besoin d'un navire de guerre pour aller les chercher. »
Répétons-le : une patache n'était pas nécessairement ce qui aurait influé beaucoup sur la « nature » de la mission Belvèze, et « corvette » à la fin n'y fera pas grand'chose [sic]! Cependant, le « gouvernement français » peut avoir tort, - car il oublie parfois de demander conseil!
« En supposant, qu'on ne connût point notre pays, le plénipotentiaire français à Londres était bien capable de réunir et expédier à ses maîtres tous les documents nécessaires. »
Où prenez-vous, monsieur du Moniteur, le droit de vous mêler de ce qui regarde le gouvernement français ou le plénipotentiaire de ce gouvernement à Londres? Et si vous avez cru qu'il soit mieux de ne pas puiser ses renseignements sur un pays dans le pays même, pourquoi donc cette autre opinion selon laquelle vous prétendez qu'il est nécessaire « d'étudier le terrain, » dans un but que vous n'indiquez même pas?
« S'agissait-il de nouer des liens commerciaux entre la France et le Canada, la France, c'est à dire le gouvernement français, savait bien que c'était à son alliée, au vainqueur des Plaines d'Abraham et de Waterloo, non à un état colon qu'il devait s'adresser. »
Dès qu'il s'agira de « nouer des liens commerciaux entre la France et le Canada, » il est probable qu'alors le gouvernement français s'adressera à l'autorité compétente, s'il ne se décide point à faire mieux encore : demander conseil au Moniteur Canadien! En quoi les souvenirs de Waterloo ou des Plaines d'Abraham sont-ils nécessaires à invoquer à propos de la visite de M. de Belvèze? Est-ce bien d'une plume « française » qu'est venue cette remarque au moins intempestive?
Nous terminons sur cet article du Moniteur Canadien, avec l'intention de revenir une autre fois sur les magnifiques rêves qui lui montrent un « voile sous lequel se cachent M. de Belvèze et ses desseins. » Nous aurons probablement du Moniteur plus de colonnes sans portée que de mots concluants sur ce chapitre que vient de créer son imagination féconde.
|
|
|