Requête des habitants de Québec et de ses environs adressée à Lord Durham, 3 octobre 1838
La base de données
La base de données comprend 4143 noms. Elle a été réalisée à partir de la requête des habitants de Québec adressée à Lord Durham en 1838. L’adresse originale sur parchemin est conservée aux Archives nationales à Québec dans le dossier John George Lambton Durham de la Collection Centre d’archives de Québec (P1000, S3, D2732). Elle a été numérisée et est accessible en ligne.
Le relevé des noms de la requête de Québec a d’abord été publié dans le Rapport de l’archiviste de Québec pour 1955-1956, 1956-1957, tome 36-37, Québec, Rédempti Paradis, s. d., p. 1 à 29. Les données publiées ont été validées en se servant du document original.
Conseil pour la recherche
Plusieurs prénoms ne comportent que des initiales. Essayez d’abord avec les noms seulement.
Une source pour connaître la population anglophone de Québec
La requête des habitants de Québec adressée à Lord Durham en 1838 a été signée majoritairement par la population anglophone. C’est pratiquement un recensement de ce groupe, se situant ainsi entre le recensement de 1831 et celui de 1851-1852.
En 1844, un sommaire du recensement pour le comté de Québec précise les lieux de naissance. Les origines des 45 761 habitants du comté sont les suivantes : 27 698 Canadiens français, 7 734 Canadiens anglais, 7 267 Irlandais, 1 598 Anglais, 981 Écossais, 276 nés dans un autre pays, 122 Américains et 85 individus dont le lieu de naissance n’est pas donné. Il y aurait donc environ 18 000 hommes, femmes et enfants anglophones dans la région. Or, pour Québec et les environs, près de 4 000 des signataires sur 4 143 sont anglophones.
La requête des habitants de Québec à Lord Durham (1838)
La nomination de Durham
Les événements de 1837 avaient provoqué, à Londres, de violents débats sur le Canada. Ces débats aboutirent à la suspension de la Constitution du Bas-Canada pour trois ans et à la nomination d’un commissaire qui enquêterait sur l’état de la colonie. Lord Durham accepta ce poste. Le 30 mars 1838, il recevait une commission de capitaine général et de gouverneur en chef. De plus, Durham était commis, avec le titre de haut-commissaire royal, pour trouver une solution aux problèmes du Haut et du Bas-Canada relativement à leur gouvernement futur. Le 29 mai, Lord Durham débarquait à Québec.
Durham créa le 28 juin un nouveau conseil spécial dont les membres, tous étrangers au Canada, furent choisis dans la flotte, l’armée ou l’entourage du gouverneur. L’activité de Durham avait été jusqu’ici débordante. Mais, dans la poursuite de son œuvre de pacification, Durham se heurtait à un mur : le problème des prisonniers politiques, encore nombreux. Le crime légal des citoyens pris les armes à la main était certain; l’instruction de procès menaçait néanmoins de réchauffer à nouveau les esprits. Cependant, une bonne partie de la population anglaise restée fidèle au gouvernement réclamait l’application de peines très sévères à l’endroit des rebelles. Pour assurer le succès de sa mission au Canada, Durham devait trouver immédiatement une solution qui contenterait toutes les parties en cause.
Une solution désavouée par les autorités anglaises
Durham imagina de convaincre les principaux chefs de l’insurrection de plaider leur culpabilité et de se remettre à la discrétion de l’exécutif. Dès qu’il fut en possession d’une lettre à cet effet, Durham forma son conseil spécial, le 28 juin, et fit approuver, le même jour, une ordonnance qui décidait du sort des principaux prisonniers politiques impliqués dans les troubles de l’année précédente.
Par cette ordonnance, huit détenus étaient exilés aux Bermudes et devenaient passibles de la peine capitale s’ils revenaient sans la permission du gouverneur. Quant aux patriotes réfugiés à l’étranger, et contre qui on avait émis des mandats d’arrestation pour trahison, ils encouraient également la peine de mort, advenant leur retour au pays sans l’autorisation du gouverneur. Exilés et fugitifs pourraient néanmoins, si les autorités de la province le jugeaient à propos, rentrer au pays à la condition de donner des cautions.
Enfin, dans une proclamation datée du même jour, Durham accorde une amnistie complète à tous les autres détenus politiques, à la seule condition pour eux de fournir des cautions. Durham semblait avoir gagné la gageure. Il avait vidé les prisons à la satisfaction générale. Apaisée par l’éloignement des chefs de la rébellion, la population anglaise du pays y voyait un geste de justice; les Canadiens français louaient la clémence du gouverneur.
Quand on apprit, au Parlement anglais, la teneur de l’ordonnance et de la proclamation du 28 juin, les critiques à l’endroit de Durham devinrent très violentes. Durham avait outrepassé ses pouvoirs. Il était allé à l’encontre des lois du Royaume-Uni en condamnant, sans procès, des prisonniers à l’exil. Il n’avait de plus aucune juridiction sur les Bermudes et ne pouvait y exiler qui que ce soit. L’ordonnance fut finalement désavouée, parce qu’elle était illégale et arbitraire.
La rédaction de la requête
La première nouvelle de cette affaire parvint à Québec le 19 septembre, par l’intermédiaire d’un journal new-yorkais. Durham décida immédiatement d’abandonner ses fonctions et de rentrer le plus tôt possible en Angleterre.
Cependant, des réunions furent convoquées partout dans la province, afin d’adopter des résolutions appuyant la politique du gouverneur et le priant de ne pas démissionner. De nombreuses adresses furent envoyées, aux mêmes fins, à Lord Durham.
Le 3 octobre, à la Bourse de Québec, on tenait une importante assemblée. L’assistance fut nombreuse et enthousiaste. Sous la présidence d’Andrew Stuart, l’assemblée adopta sept résolutions qui firent la matière d’une adresse à Durham. Cette adresse ayant été lue et approuvée à l’unanimité, on composa un comité de 20 membres chargés de solliciter des signatures pour ce document.
Le mardi 9 octobre, vers 16 h, une foule de 3000 personnes s’était massée près de la Bourse de Québec. Un défilé s’organisa et prit la direction du Château Saint-Louis. On allait lire l’adresse à Durham. Nombre de personnes attendaient le défilé aux abords du château. Andrew Stuart s’avança et lut l’adresse des « inhabitants of the City of Quebec and its vicinity (habitants de la ville de Québec et des environs) », dont voici une traduction. Le texte original a été publié dans le Rapport de l’archiviste de Québec pour 1955-1956, 1956-1957, tome 36-37, p. 5 et 6.
À SON EXCELLENCE,
Le très honorable John George, comte de Durham, vicomte de Lambton &(c) &(c) chevalier de la grand-croix du très honorable ordre militaire du Bain, membre du très honorable Conseil privé de Sa Majesté, et gouverneur général, vice-amiral et capitaine général de toutes les provinces de Sa Majesté situées à l'intérieur et à proximité du continent nord-américain &(c) &(c) &(c)
Qu'il plaise à Votre Excellence,
Nous, les sujets les plus dévoués et les plus loyaux de Sa Majesté, habitants de la ville de Québec et de ses environs, avons considéré comme une forte preuve de la gracieuse attention de Sa Majesté au bonheur et à la prospérité de ses provinces nord-américaines le fait qu'il ait plu à Sa Majesté d'en confier le gouvernement à Votre Excellence, en la fermeté, la justice et l'intégrité de laquelle nous avons placé la plus grande confiance, assurés qu'entre vos mains les pouvoirs du gouvernement seraient orientés vers les véritables intérêts du peuple.
C'est avec ces sentiments que nous avons accueilli l'arrivée de Votre Excellence, dans l'espoir gratifiant que, pendant que des mesures seraient adoptées pour éliminer les inconvénients les plus immédiats et les plus pressants découlant de la suspension des pouvoirs de la législature ordinaire de cette province, et pour rétablir la tranquillité dans le pays qui souffre encore des effets d'une rébellion cruelle et non provoquée, un système de gouvernement pour les Canadas serait mis au point sous les auspices de Votre Excellence, qui rétablirait, sur des bases solides, l'ordre social, favoriserait leur bien-être et leur prospérité, et renforcerait les liens qui les unissent, favoriserait leur bien-être et leur prospérité, resserrerait les liens qui les unissent à l'État mère et les unirait inséparablement, par les sentiments comme par les intérêts, au puissant Empire dont ils font partie. )) Dans la poursuite des enquêtes liées à ce sujet vaste et compliqué, nous ne pouvons nous empêcher de reconnaître avec gratitude les efforts inlassables de Votre Excellence depuis votre arrivée.
C'est donc avec la plus grande inquiétude que nous constatons qu'alors que ces importants travaux sont en cours, des circonstances se sont produites qui pourraient conduire à une cessation inattendue et abrupte de vos relations officielles avec cette province et les provinces adjacentes ; nous déplorons profondément la discussion prématurée au Parlement britannique des mesures de Votre Excellence, et la ligne de conduite qui y a été adoptée, tendant, comme elles l'ont fait, à affaiblir l'influence morale de Votre gouvernement, à encourager les mécontents et à créer des appréhensions dans l'esprit des loyaux.
Nous attendions avec anxiété le moment où nous serions mis en possession du résultat des travaux de Votre Excellence, qui, nous l'espérions, conduirait à l'établissement d'un système efficace de gouvernement dans la colonie, protégeant les droits de toutes les classes de sujets de Sa Majesté.
Nous sommes convaincus que rien n'aurait pu contribuer davantage au règlement avantageux de cette grave question que la détermination que Votre Excellence a bien voulu exprimer de communiquer aux provinces, pour qu'elles l'examinent, tout plan que Votre Excellence pourrait former à cet effet, avant de le soumettre au Cabinet et au Parlement impérial, donnant ainsi aux habitants de ces provinces l'occasion de transmettre à Votre Excellence et à l'autorité suprême de l'Empire une expression franche et loyale de leurs sentiments à cet égard.
Convaincus de l'éminente compétence de Votre Excellence et de Votre disposition à promouvoir les grands objectifs qui vous ont été confiés, et craignant les conséquences qui résulteraient de votre retrait du gouvernement de ces provinces, nous vous prions d'exprimer l'espoir sincère que, malgré ces obstacles imprévus, Votre Excellence pourra être amenée à continuer d'exercer les fonctions de Votre haute fonction jusqu'à ce que vous ayez atteint les objectifs importants de Votre mission, pour la réalisation desquels Votre Excellence peut compter sur notre coopération zélée.
Si, toutefois, Votre Excellence conserve la conviction que vous ne pouvez plus gouverner la colonie avec satisfaction pour vous-même, nous sommes assurés qu'à votre retour en Angleterre, vous rendrez, dans un autre domaine, les renseignements que vous avez acquis par vos travaux ici, propices à l'établissement de la paix et du bien-être permanents de ces provinces.
Québec 3(rd) Oct(r) 1838.
Remerciements
Nous remercions Laurence Lefebvre, étudiante à l’emploi de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, pour la validation des données publiées.